Nous avons récemment évoqué notre capacité à « bien veiller » et vu comment la bienveillance avait besoin d’une certaine dose d’exigence pour ne pas tomber dans la complaisance. Explorons cette semaine comment nous pouvons mettre en œuvre 4 éléments clefs pour que cette exigence soutienne pleinement notre bienveillance.
Déterminer ce qui est réellement utile
Trop souvent, notre exigence est le fruit de notre éducation, de nos habitudes, de conventions sociales… ou le moyen de contrer notre inquiétude (comme un manager qui met la pression pour arriver à un résultat supérieur de 20 % à ce qui est nécessaire, afin de compenser sa crainte que les équipes ne réalisent pas ce qui est nécessaire). Il nous faut alors déterminer ce qui est vraiment utile :
- la première étape ici est de clarifier le sens de l’action en répondant aux deux questions « Pourquoi » :
- « Pourquoi », qui nous aide à expliciter les raisons pour lesquelles agir : dans quel contexte, en fonction de quelle difficulté rencontrée, de quel constat réalisé… ici, nous regardons le passé et le présent
- et « Pour quoi ? », qui nous aide à expliciter la finalité, les objectifs concrets, les résultats attendus
- la deuxième étape est de fixer le niveau d’exigence en fonction des résultats attendus. Cette évaluation est efficace quand elle est précise : ne pas demander plus, ne pas demander moins non plus ! Cela exige de connaître suffisamment le domaine concerné, les aléas prévisibles, les moyens disponibles… Car une exigence efficace est une exigence réaliste.
- et du coup, être prêt·e à ajuster notre niveau d’exigence, ne serait-ce que dans le temps et l’organisation : prévoir des marches d’escalier pour permettre l’apprentissage des personnes impliquées et pouvoir proposer ce qui les stimule. Il est utile de déterminer ce qui est juste au-delà de la zone de confort de chacun·e (soi et les autres)
Identifier les besoins (de soi, de l’autre, de la situation)
Prendre le temps d’évaluer clairement les besoins de chacun pour atteindre le résultat attendu et s’organiser pour y répondre est trop souvent oublié quand on parle d’exigence. Pourtant, c’est un des moyens indispensables pour avancer vers la réussite ! Nous nous pencherons ici sur :
- les besoins fondamentaux, ce qui va motiver profondément chaque personne :
- respect, par exemple être pris en considération dans ma façon de fonctionner
- reconnaissance, par exemple être sollicité pour réévaluer le processus en cours, ce qui reconnait mon implication et mes compétences
- apprentissage, par exemple travailler en binôme avec une personne plus expérimentée
- valorisation, par exemple être nommé quand le travail est présenté à une tierce personne
- etc.
- les besoins opérationnels, ce qui va être concrètement nécessaire pour réaliser les tâches
- temps, en fonction de ma charge de travail, comment ces nouvelles tâches vont-elles rentrer dans mon planning ? combien de temps prendra chaque activité ?, etc.
- moyens, outils, méthodes, matériaux, partenariats, etc.
- connaissances et compétences, un savoir intellectuel suffit-il ? une maîtrise acquise par l’expérience est-elle nécessaire ?
- etc.
Communiquer et re-communiquer
Trop souvent, nous ne communiquons que superficiellement. Nous exigeons les résultats attendus, puis – dans les meilleurs des cas – nous faisons part de notre satisfaction ou de notre insatisfaction – avec reproches et culpabilisation (envers nous-mêmes ou envers les autres). Donc, attelons-nous à communiquer, et ce, auprès de toutes les personnes concernées :
- le sens : les réponses aux deux « Pourquoi ? »
- le cadre et le processus de travail – avec la précision de l’implication de chacun, et du fait que nous sommes prêts à réguler
- le planning prévu – et ses itérations
- les réajustements – au fur et à mesure
Revenir régulièrement faire le point sur les avancées – et recueillir les réactions et propositions de chacun·e – est indispensable ! Cette partie « communication » est vitale pour que chaque personne s’auto-organise, se motive et s’implique tout le long du processus.
Et pour aller encore plus loin dans cette autonomie – auto-organisation, motivation, implication, un aspect spécifique de la communication va faire toute la différence :
Féliciter et réguler régulièrement
En France, nous sommes connus et reconnus pour notre capacité à « râler », nous plaindre et porter notre attention sur ce qui ne nous va pas. Notre éducation, notre culture collective nous pousserait à ne voir et ne parler que des aspects négatifs de notre vie quotidienne. Heureusement que – en partie au moins – cette réputation est fausse. Nous sommes capables de repérer et de reconnaître ce qui va bien ! Alors utilisons ces compétences pour prendre la responsabilité de l’amélioration continue. Disciplinons-nous pour :
- féliciter régulièrement (soi et/ou l’autre).
- Dès les premiers mouvements réalisés vers le résultat attendu – changement de comportement, tâche à réaliser, prise d’initiative… féliciter pour ce qui avance ne veut pas dire lâcher l’affaire, se détourner de l’effort ! Trop souvent, quand nous exprimons un « Bravo et merci ! », nous avons tendance – inconsciemment – à faire descendre notre énergie. Et la personne qui reçoit ce « Bravo et merci », ce « Oui, c’est ça ! » a tendance à se relâcher. Il s’agit ici de rester dans la dynamique, même lorsque nous reconnaissons ce qui a été initié, les premiers pas réalisés
- évaluer les résultats et recadrer si nécessaire
- c’est un processus continu – d’ailleurs utile pour pouvoir féliciter régulièrement. Évaluer régulièrement ce qui a été fait et le degré de qualité de ce qui a été réalisé est un acte de responsabilisation. Reconnaître le réalisé aux points d’étapes et proposer des options en cas de besoin pour réajuster ce qui n’irait pas dans le bon sens est un des moyens de faire grandir la confiance de toutes les personnes impliquées. Évidemment, les options peuvent être co-construites, ce qui est aussi utile pour nourrir cette confiance et répondre aux besoins fondamentaux nommés ci-dessus
- remettre en question les règles établies, les faire évoluer si besoin. Au fur et à mesure que ce qui est demandé est réalisé, nous pouvons regarder si le cadre posé est toujours un soutien. Si certaines règles de fonctionnement s’avèrent des freins, des gênes, nous avons la responsabilité de les faire évoluer. Nous pouvons régulièrement regarder :
- si les règles de fonctionnement sont réalistes ? Si je demande à un·e proche d’arrêter de parler fort en ma présence alors que cette personne parle de cette façon depuis toujours, je ne suis pas réaliste. La règle de fonctionnement entre nous serait plus ajustée si nous convenons que je lui fais signe quand le volume est trop fort pour moi. Ainsi cette personne pourra faire cet effort sans prendre mal ma demande, puisque nous nous serons mis au préalable d’accord sur ce code et cette façon de faire
- si nous devons enlever, ajouter, reformuler… une ou plusieurs de nos règles de fonctionnement communes. L’expérience d’avancer dans ce que nous nous sommes définis comme objectifs nous permet de constater ce qui fonctionne et ce qui est à réajuster
- comment communiquer ces réajustements à l’ensemble des personnes concernées
- féliciter régulièrement (soi et/ou l’autre).
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Pour rappel : ce travail est tout aussi indispensable lorsqu’il s’agit d’une exigence envers moi-même !
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Ces quelques bonnes pratiques pour mettre en œuvre l’exigence comme soutien à la bienveillance sont mes premières pistes de réflexion. Qu’en est-il pour vous ? Ces pistes vous aident-elles ? Vous voyez-vous, grâce à ces réflexions, plus à même d’être concrètement exigeant·e·s dans votre bienveillance ? Et peut-être avez-vous d’autres options à me suggérer ?
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Crédit photo : Julia Larson
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